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Association Teranga
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28 avril 2008

La Presse de la Manche - 22 avril 2008

Une petite goutte de Cherbourg au Sénégal

De nombreuses associations du Cotentin se mobilisent à longueur d'année pour aider les pays en voie de développement. Nous avons eu la chance de participer (à nos frais bien sûr) à une opération de formation menée sous l'égide de l'association cherbourgeoise Teranga au village de la Somone au sud de Dakar. Un médecin, une ancienne hôtesse de l'air secouriste, une ancienne élue spécialiste du tourisme, un professeur de chant et... deux journalistes : cette équipe d'amis hétéroclite n'avait pas grand-chose de vital à apporter, pensait-elle, sinon l'envie de faire quelque chose d'utile. Nous allons vous raconter cette aventure humaine sans prétention telle que nous l'avons vécue.

mardi : bissap et bouyé chez le chef du village

Dakar à 3h30 du matin (2h30 heure locale). Derrière le grand sourire d'Ousmane, notre guide à tout faire pour le séjour, il y a une Fiat rouge rustique à 7 places. Nous voilà partis à bord pour 2 heures de route cabossée, le pare-brise noyé de buée, à la merci d'une collision de plein fouet, que nous évitons de justesse.

indiens

Une fois de plus, la distribution des fameuses plumes d'indiens de la Presse de la Manche n'a fait que des heureux parmi les douze enfants de la famille élastique d'Ousmane

Cinq heures de repos. Déjà 11 heures locales. Nous marchons comme des mules sur le sable fin de la plage vers l'Africa Queen, chez notre ami Abdou Babou Dia, correspondant incontournable de l'association Teranga et responsable marketing de l'hôtel. Pamplemousse pressé pour tout le monde. Il nous donne rendez-vous avec le chef du village, dès ce soir à 17 heures, après la sieste. Premières photos. Le vol ample du Milan noir des touristes bien accompagnés sur la plage, une nuée d'enfants assis sur un mur au loin, une jeune fille qui porte un panier sur la tête (il faudra s'habituer), des moutons sans laine que nous prenons pour des chèvres, des vieux qui palabrent sous une pergola, un supermarché comme chez nous, un stand de légumes typique au bord de la route principale, axe vital du village.

13 heures : premier bain. Elle est fraîche. 18 degrés. Comme à St Martin de Bréhal, dit Huguette (l'été). Il fait 25° à peine dehors. Les poissons grillent déjà sur le barbecue d' Ousmane et Adama, son épouse, épluche les oignons. La sauce au citron vert sur la carpe rouge, c'est divin. Mais elle est où la misère ?

chez_le_chef_du_village

Salif Diouf, le chef du village, nous accueille avec solennité. Premier contact avec les réalités d'un pays aux prises avec les injustices et la crise du pouvoir d'achat

A 17 heures, Salif Diouf, élu chef du village pour un bail indéterminé, nous accueille dans une grande pièce en longueur au coeur d'une sorte de ferme où trône une vache caramel issue d'un père français et d'une mère sénégalaise. Le chef est assis en contre-jour sous la seule fenêtre, dans un fauteuil en fer orné de coussins dorés, avec un ventilateur en guise de sceptre. Nous buvons du bouyé, à base de pain de singe, ces graines de baobab excellentes contre le " rhume des fesses ", et du bissap, fait avec de la roseille locale (hibiscus ?) un peu acidulée, du plus beau rose.

babacar_14e_enfant

Babacar, 14ème enfant de Max, le frère du chef du village

La discussion est sérieuse et tourne autour de la corruption des politiques. On sent Salif et son frère Max avides de progrès et de justice, mais désepérés de voir que rien n'avance. Les députés s'offrent des 4X4 de luxe tandis que le peuple n'a rien pour vivre, surtout en ce moment où les prix explosent. A leur niveau, ils ont commencé à travailler avec les communes environnantes pour développer le tourisme sur la lagune. Nous apprenons que la mer mange la terre. Cent cinquante mètres de littoral ont disparu en dix ans.

enfants_riants_pour_blog

Sur le chemin de la maison du chef du village, quelques heures après la France, le merveilleux sourire des enfants sénégalais

En sortant de chez Salif et Max, festival de photos d'enfants. Sali et son marteau, Hussein, Mango et Free, qui nous tirent la langue en riant.

free_vous_salue_bien

Hussein, Mango et Free vous saluent bien !

Daba Faye, la sage-femme du dispensaire, qui a accouché cinq femmes par semaine depuis 1981, s'excuse de ne pas avoir de diplômes mais se sait indispensable.

daba_l_accoucheuse

Daba Faye, la sage-femme : cinq bébés par semaine

Oraya et Mamadou, attendent anxieusement l'infirmier qui dialogue avec Hervé, le docteur qui fait partie de notre groupe. En sortant nous rencontrons des musiciens de djembé qui nous invitent à leur concert. On croise une femme qui transporte un énorme colis sur sa tête, surmonté d'un sac de linges, un grand seau blanc dans une main et un bébé dans son dos. Elle nous demande de l'argent pour la photo prise au flash à la nuit tombée. Nous donnons 1.000 FCFA, ce qui est beaucoup trop (10 F français avant l'Euro).

oraya_et_mamadou

Oraya et Mamadou attendent l'infirmier au dispensaire

Au repas du soir, Adama nous a fait encore du poisson, au four, notre premier mérou. Délicieux.

Il suffirait d'irriguer

mil

L'agriculture repose uniquement sur la production du mil et de l'arachide, alors qu'il y aurait assez d'eau pour fournir du riz à tout le monde autour du fleuve Sénégal

Au cours de notre séjour, nous avons eu maintes fois l'occasion d'évoquer avec les habitants de la Somone le problème du niveau de vie. La hausse des prix est encore plus sensible au Sénégal qu'ailleurs. Hormis le fait qu'il n'y a pas de pétrole et que le prix du litre d'essence est le même qu'en France, c'est l'un des pays d'Afrique où toute l'alimentation ou presque est importée. L'agriculture était jusqu'à présent totalement concentrée sur la culture du mil pour la nourriture courante locale, et la culture de l'arachide pour l'exportation. La culture de l'arachide est en perte de vitesse à cause du changement climatique et de la chute des cours. Les ruraux de la brousse désertent leurs villages pour tenter de gagner leur vie sur la côte en assurant tous les petits métiers liés au tourisme, comme gardien de nuit, un métier qui leur suffit à peine à se nourrir et ramener un peu d'argent à leur famille toutes les trois semaines. Le riz consommé par les Sénégalais est essentiellement asiatique. Curieusement, ils boudent la production locale qui est mal conditionnée et de moins bonne qualité à leurs yeux. Il suffirait cependant d'irriguer les rives du fleuve Sénégal pour produire suffisamment de riz pour nourrir le pays. A la Somone, il y a pratiquement un puits dans chaque terrain. Malheureusement, faute de savoir-faire, les fruits et légumes ne sont pas produits sur place.

Très critiqué pour son inaction, le président Wade a annoncé enfin cette semaine que le Sénégal mènera une nouvelle politique agricole pour parvenir à l'autosuffisance dans les cinq ans qui viennent.

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